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| Chapitre 5 |
Le rendez-vous
Kevin lut le message à voix haute.
Salut Kevin, c'est Cam. Je ne sais pas si tu vas encore vouloir m'écouter après ce que je t'ai appris. Je suis absolument désolé si je t'ai brusqué :) Bref, j'arrête de trop parler… RDV au petit parc Jefferson, celui qui est à côté du lycée. Tu vois où il est ? Au pire, t'as qu'à regarder sur Internet ;) Je t'attendrai sous le temple chinois à 20h30. Démerde-toi pour pouvoir sortir et m'y rejoindre STP. Je t'attendrai pas. Si t'es pas là à 20h31, j'me barre. J'aimerai beaucoup te parler. À ce soir, j'espère...
Kevin en eut des sueurs froides. Que lui voulait Cam ? Pourquoi lui donnait-il rendez-vous ? Sûrement pour s'excuser… Il ne savait quoi penser : fallait-il se rendre au rendez-vous ? Serait-ce dangereux ? Toutes ces questions s'emmêlaient dans sa tête. Il se recoucha et programma son réveil à 19h45.
N'arrivant pas à dormir, il se leva et se dirigea vers son ordinateur. Il se connecta sur son jeu en ligne préféré. Il jouait depuis une heure et demie quand son téléphone sonna. Il était 19h45. Il passa sa main dans ses cheveux bruns en bataille et éteignit son ordinateur. Il entra dans la salle de bains et observa ses yeux vers dans le miroir quand il crut voir sortir de sa chambre une ombre, derrière lui. Il sursauta et entra en trombe dans sa chambre : son ordinateur portable avait disparu !
20h15. Il était temps de partir au rendez-vous de Cam, mais il n'avait toujours pas retrouvé son ordinateur. Tant pis, il le retrouverai plus tard. Il fallait qu'il aille au parc près du lycée. Il rangea son portable dans sa poche et enfila son sweat-shirt. Il prit en morceau de papier et laissa un mot à sa mère :
Maman, je me sens mieux et je suis parti réviser mes maths à la bibliothèque avec un copain. Je pense que je vais revenir tard. Ne m'attend pas pour manger. Gros bisous, je t'aime. Kev'
Il descendit lentement les escaliers en veillant à ne pas faire craquer les marches. Il découvrit sa mère qui dormait sur le fauteuil du salon. Il déposa le mot sur la table basse, saisit au passage une barre de céréales et sortit à l'air libre. Il consulta sa montre : 20h28. Il était en retard, et pas qu'un peu !
Il se mit à courir en direction du lycée. Le vent nocturne fouettait son visage, mais Kevin s'en fichait : il devait à tout prix rencontrer Camille, ce soir là. Il arriva en vue du parc Jefferson, où Camille lui avait donné rendez-vous. Il se demandait ce que voulait dire son ami par « Je t'attendrai sous le temple chinois »… Tant pis, c'était trop tard pour reculer. Il devait trouver ce temple avec 20h30, ce qui lui donnait encore… 45 secondes ! Il entra en trombe dans le parc. Il suivit le chemin de gravier et arriva -miracle !- devant une construction qui faisait penser à un temple asiatique ; Camille l'attendait.
Un lampadaire était placé à quelques pas de là, mais il était apparemment tombé en panne, si bien que le visage pâle de Camille n'était éclairé que par la faible lumière de deux lanternes placées sur le temple. Tout le reste du parc et ses alentours, les arbres, les buissons, les bancs… Tout était plongé dans l'obscurité. Camille déclara d'une voix forte qui fit sursauter Kevin :
- Je suis content que tu sois venu, Kevin… Approches, n'ai pas peur, je ne vais pas te manger…
Kevin s'exécuta.
- Tu sais, Kevin… Tu sais que tu n'es pas du tout en sécurité, au lycée ?
Kevin opina de la tête.
- Tu sais aussi que ta vie est menacée chaque seconde que tu passes là-bas, je me trompe ?
- Non, répondit Kevin, mais qu'est-ce que tu sous-entend ?
- Moi ? Rien du tout. Pourquoi as-tu peur comme ça ? Je sens ta peur. Tu empestes la peur, Kevin.
Un rictus se dessina sur ses lèvres. Un rictus de prédateur. Le cerveau de Kevin lui hurlait de tourner les talons et de prendre ses jambes à son cou, mais il était pétrifié ; il ne pouvait plus bouger. Camille s'approcha lentement de lui.
- As-tu peur… de moi ?
Kevin avala difficilement sa salive et bredouilla une réponse. Camille avança son visage à une vingtaine de centimètres du sien.
- Il ne faut pas, tu sais… Tu le sais, n'est-ce pas ?
- Euh… (Il déglutit.) Oui… Oui, je le sais…
- Alors, pourquoi as-tu peur de moi ?
Camille sourit et dévoila ses dents. Sous les yeux ébahis de Kevin, ses canines s'allongèrent. Qu'avait donc Camille derrière la tête ? Il n'allait quand même pas le… Si ?
Des tonnes de questions se bousculaient dans la tête de Kevin : Camille ne pouvait pas faire ça ! Pas à lui ! Et pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi le tuer tout de suite ? Il allait de toute façon mourir un jour ou l'autre, bientôt, à cause du lycée… Mais pourquoi tout de suite ? Il pouvait vivre encore quelques jours, voire quelques semaines ou, avec un peu de chance, quelques mois ! Pourquoi infliger cela à sa mère ? Elle avait déjà perdu son mari, il y a neuf ans de cela, et elle ne s'était toujours pas remise. Sa petite soeur n'allait pas le supporter non plus. Alors pourquoi ?
Le sourire de Camille disparut, et, comme s'il avait lu dans ses pensées, il lança :
- Tu veux savoir pourquoi ? De toute façon, je ne sais même pas encore si tu vas mourir ou pas… Mais bon, tu as le droit de savoir, c'est sûr. Bref, parce que, au moment de ma transformation -en vampire, hein-, eh bien, j'ai proie que je ne ferai jamais de mal à mes amis. Ça parait un peu tiré par les cheveux, dit comme ça, mais bon… Si tu veux savoir plus précisément…
« J'étais tombé malade… Une maladie incurable. J'étais allongé sur un lit d'hôpital. Je respirai mal, on devait me nourrir par perfusion sinon je vomissais avant de digérer… Mais ça, tu t'en fous, n'est-ce pas ?
« Un ami était venu me voir à l'hôpital. Il m'a demandé : "S je meurs pour toi, me promets-tu de toujours protéger tes amis, quel qu'en soir le prix à payer ?" J'ai répondu que oui, sans réfléchir. Je ne savais pas qu'il était vampire, ni qu'à l'époque les vampires n'avaient qu'une petite dose de poison… Maintenant, c'est différent : on en a autant que vous avez de sang.
« Alors il m'a mordu. Quand je me suis réveillé, il était étendu à ma place, dans mon lit d'hôpital, il était mort, j'étais debout, vivant… (Il essuya une larme qui perlait au coin de son oeil.) Et depuis qu'il s'est sacrifié pour moi, je sais ce que représente un ami. Et je veux tenir ma promesse : tu es beaucoup trop en danger dans ce lycée, Kevin. Je dois le faire. Tu ne pourras pas m'en empêcher.
Il sembla réfléchir un instant.
- Hmm… Je te laisses envoyer un message à ta mère. Tu as ton portable avec toi ?
Kevin opina et sortit son téléphone de sa poche. Camille le lui arracha des mains.
Maman, je suis désolé, mais je dois partir. Je suis obligé ; je ne veux pas vous faire du mal, à toi et à
- Dis, Kevin, elle s'appelle comment ta soeur ?
- Mia.
Mia. Au revoir maman. Je pense que je reviendrai, mais je ne suis pas sûr… Je te dis adieu au cas où.
- Voilà ! Envoyer. C'est bon ! Maintenant, passons aux choses sérieuses…
Sans prévenir, il se jeta sur Kevin, qui ressentit une atroce douleur. Puis plus rien, le trou noir.
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